Projet X à Derbo...
...ou l'année des queutes sur le lapiaz des Crêtes. Malgré un acharnement sans réserve, les troupes ne permirent pas au lapiaz d'exprimer tout son potentiel comme lors des années précédentes. Mais l'ambiance là-haut reste la même et les têtes de noeuds que l'on y croise traditionnellement n'ont rien perdu de leur malice, s'offrant une semaine de franche rigolade couplée à de grands moments de vie.
L'aventure commence le vendredi soir au Godey (on ne change pas une équipe qui gagne, disait l'autre) par un plat de roesti montagnards (idem) et un bon verre de rouge (...). Les affaires sont empaquetées, l'héliportage aura lieu tôt... 6h00, tout le monde est debout et bientôt des églises, dortoirs et autre Camper, tout le monde afflue vers le lac où aura lieu l'héliportage. Bientôt l'oiseau de fer se présente sur la place et transporte le matériel de tous les habitants du coin ainsi que le nôtre, sans compter un petit vol touristique pour Damien, Christian, PX et Coline. Ensuite, les sportifs embrayent la montée sans oublier de se farcir un p'tit déj' au restaurant du lac. Passage par les Frindses pour arriver au camp qui est déjà presque fin prêt. Dans l'après-midi, les troupes se divisent : Damien va continuer son aménagement du Trou de l'Aspirateur (à rebaptiser selon certains) alors que Mat et Louis partent à l'aventure du côté d'une entrée repérée en 2013. Mat s'enfile dans une trémie qui forme par la même occasion une voûte au dessus de cette entrée, et pousse les traditionnels cris de jubilation arrivé au fond : ça continue ! Les cailloux roulent un bon, et les pronostics vont bon train : P50 ? Allez, y a au moins 30 m. S'ensuit un aménagement de l'entrée induit par le réflexe très humain, comme qui dirait, de la peur de finir ses jours écrasés par un bloc de 3 tonnes au fond d'un trou. Un bloc est même arrimé par un palan pour éviter de glisser au fond de la cavité, qui sera nommée Gouffre au Jean, en pensée à notre traditionnel cuisinier-méditant, qui a dû rester en bas pour cause de problèmes de santé...
En soirée, c'est le fameux poulet au curry qui régale les troupes. Soirée 2ème Guerre Mondiale avec un reconstitution de faits historiques magnifiquement interprétée par PX, et soulignés sans ménagement par les commentaires plus ou moins tordants de Grand-Père Chopard. Comme si on y était. Le lendemain, l'équipe se voit scindée en plusieurs morceaux : ceux qui n'en foutent pas une, celui qui ne peut en foutre une, on l'appelle aussi la Terreur du Frigo, ceux qui vont explorer le Gouffre au Jean en première et ceux qui vont continuer de faire des tunnels. Ne possédant point de don de télépathie ni de démultiplication physique ou mentale, je me vois contraint de conter l'aventure que j'ai vécu qui sera parallèlement la grande première du camp : l'exploration du Gouffre au Jean. Comme tout avait été aménagé la veille, les 3'57'' qui nous séparent du camp seront le seul obstacle à franchir avant que je ne me lance dans le puits perfo au poing et sourire aux lèvres, une belle première s'annonce ?... Premier puits équipe, puis deuxième, ah non, enfin si, ou plutôt est-ce le même ? Bref, vers -20 je cède la place à Mat qui se jette dans le dernier puits avant d'atteindre un interstrate titanesque pour la région© surcreusé d'un méandre. Notons que l'expression titanesque pour la région©, déposée par Matej au bureau de Brevets des Expressions des Comptes-Rendus du SCJ en 2013, lorsqu'elle se rapporte à la région de Derborence, signifie en tout et pour tout "qui passe". Bref, après quelques dizaines de mètres titanesques nous sommes confrontés à une étroiture bien sévère, larges d'épaules ou d'ailleurs (...) s'abstenir. Heureusement, Mat a pensé à presque tout, et les 3'57'' sont franchies dans les deux sens pour amener le matériel nécessaire à l'ouverture du dialogue avec les étroitures de la cavité. L'occasion de croiser PX et Coline qui font la topo de la cavité. Ensuite, après avoir parlementé, nous passons un coude sur la gauche, un autre sur la droite, un petit ressaut de 3 m et fin sur une faille verticle de 5 cm de large. Au pied du ressaut, un petit actif se perd dans un petit ressaut avec une petite étroiture et ça queute bien vite... C'est la fin du gouffre. La topo en poche, conclue par moi-même, nous déséquipons carrément la cavité sur-le-champ. VisualTopo nous vomit une 3D dans la soirée et nous indique une profondeur de 61 m pour ce joli petit gouffre, estampillé C45 pour l'occasion. Ouah, le camp s'annonce bien ?...
Le jour d'après, Dieu guérit Julien de ses maux, PX, Coline et lui-même (Julien, pas Dieu), vont visiter l'actif avec courant d'air aux Tsermettes. Pendant ce temps, Damien va causer avec le méandre Leica aux Polonais, accompagné par Valérie et elle-même (Leica, pas Valérie). Alors que le Team X, composé de Mat et Louis, va percer le mystère du puits parallèle du Snogoude, le tout dans une ambiance vivifiante composée de beaucoup d'humidité et d'une fraîcheur caractéristique. Après quelques aller-retours humidifiants, la corde est lancée dans la série de puits. Et 3 puits d'une dizaine de mètres conduisent à un méandre, si on peut le baptiser ainsi, large de 5 cm environ. Oh désespoir, le dernier espoir du légendaire Gouffre aux Snogoudes est réduit à néant. Ce réseau parallèle est topographié est immédiatement déséquipé. L'année des queutes est engagée.
Le lendemain, PX et Coline nous quittant, ce sont donc Julien, Mat et Louis qui montent en direction de Forcle, tels des spéléologues, jettant pierre dans doline, à l'affût du moindre courant d'air ou trou noir. Julien descend le gouffre du Galetas pendant que ses confrères passent à la baignade dans une gouille non loin de là. Puis, un puits signalé par Louis est visité, mais Mat ayant déjà failli y mourir quelques temps auparavant il est marqué d'une croix, tout comme nombre de pertes dans lesquelle Mat s'insère patiemment en t-shirt, sous l'oeil narquois de l'homme qui se plaint des sections réduites des galeries de la région, après avoir passé une semaine dans le Galetas et le méandre du Snogoude.
Mercredi, c'est enfin le moment d'aller forcer le fond des Polonais à livrer ses 4 vérités, là où un grondement a fait vrombir plus d'un cœur de spéléologue. C'est Mat et Louis qui s'y lancent. Et après une séance d'agrandissement comme on les aime, à moitié la tête en bas sur la fin dans une galerie où tourner la tête devient une opération des plus stragégiques, nous atteignons bientôt l'exténuement, plus ou moins en même temps qu'un point de vue sur la suite... un méandre de 3 m de long, 10 cm de large. Alors comme bordel, au bout d'un moment, non mais j'entends, on décide d'arrêter là tout espoir de suite au fond de la faillasse de -200. La suite se passe dans le siphon pour ces Polaks... Remontée de tous les diables (ah tiens, c'était comme ça à la descente ?) quelques mots doux lâchés sporadiquement, à une fréquence s'élevant en même temps que l'heure avance, à nos kits et à leurs sangles qui s'accrochent désespérément à la première lame venue, ainsi qu'au Croll qui refuse aléatoirement de mordre la corde à pleines dents, nous faisant reculer de 50 cm dans les puits... Mais nous parvenons à contenir notre calme, et les dernière gouttes d'Isostar sont vidées à l'occasion d'une remontée au camp plutôt astreignante. Parallèlement, Julien est allé clore l'espoir de rejoindre la rivière via le Galetas, et en s'en retournant, c'est en compagnie de Damien qu'ils découvrent le C47, trou qui aspire.
Jeudi, vaste opération de déséquipement du Snogoude, fragmentée pour un rendement optimal. C'est d'abord Mat qui ouvre les débats, suivi par Louis et Julien dans la foulée. Trois petits kitounets de corde sont évacués. La cavité est parfaitement vide à l'exception d'une bouteille 7up remplie de sirop Grenadine à la sortie du méandre... Si quelqu'un a soif...
Damien et Valérie continuent l'agrandissement du C47 qui aspire. Pliage d'une partie du camp dans l'après-midi, puis Mat et Louis s'en vont griffoner quelques croix pour finir en beauté, et descendre le C46, -20 m, section agréable, queute sur bouchon de cailloux. L'équipe est rejointe pour une soirée champagne, fondue, et plaisirs digestifs au beau milieu de la nuit.
Vendredi, le camp est plié, le team redescend, alors qu'un esseulé s'applique à attendre patiemment l'hélicoptère, en position tortue sous la fameuse bâche à trous pour se protéger de la fureur de Zeus... Descente rapide au lac pour terminer la semaine au McDo devant un bon Big-Mac Menu. Retour en terres familières plus ou moins confortables en fonction de la sophistication du véhicule emprunté (les 2-roues représentant le 0 absolu de l'échelle de confort par temps de pluie pour des trajets excédent la centaine de kilomètres et un équipement à l'imperméabilité relative). Point d'orgue le samedi après une bonne douche, où le matériel est remisé aux Grands-Champs et la bière de l'amitié partagée.
Pour les amateurs de résumés, ne faites pas les timides, en voici un :
- C38, Gouffre du Snogoude : Le dernier objectif dans la lucarne se solde par trois puits et queute aboslue. Cavité déséquipée. Environ -180 m.
- C44, Trou de l'Aspirateur : Seul Damien a vu le fond, mais le feu qui brûlait en lui en début de semaine semble s'être dissipé, le pire est à craindre. Il s'agit d'un tunnel artificiel aspirant fortement...
-C45, Trou du Jean : 30 m de puits, 50 m de méandre/interstrate et queute définitive. Découverte & Explo 2015.
-C46, Non nommé, -20 m, 30 m de développement, 3 ressauts mènent à un bouchon de cailloux, lucarne dans le dernier ressaut mène à une salle également obstruée. Découverte & Explo 2015.
-C47, Non nommé, Aspire, il faut encore s'acharner sur un bloc qui bouche le passage. Découverte & Explo 2015.
- TS1, Tsermettes, l'actif en bas est équipé, minage éventuel au fond. Léger courant d'air. Julien semble mitigé.
- TS7, Polonais, la faille avec bruit d'eau queute définitivement, parlementer avec le siphon est le dernier espoir pour que le gouffre survive.
- Galetas, Julien a exploité toutes les ressources de cette cavité qui queute défintivement. Déséquipé 2015.
En conclusion, plus grand chose n'a survi à cette édition 2015 sur la zone de Crêtes... Le doute plane, mais l'équipe garde les coudes serrés ;-)